Nous faisons ici écho des déclarations de quelques-uns d’entre ceux qui ont pu, malgré tout ce qui les en dissuade, se faire entendre ; il n’en reste pas moins que les principaux intéressés sont actuellement privés de leur liberté sur notre territoire et, de fait et de force, empêchés de faire valoir leur parole et leur droit.
L’usage de menottes dans l’avion, le commandant de bord, une expulsion réussie
« Le sierra léonais a voyagé avec nous en pleurant. Les passagers ont vivement protesté contre les conditions inhumaines de son voyage. Les policiers ont été sourds à leurs revendications. On a fait appel au commandant de bord pour son assistance, il en est resté sourd car cela allait contre les règles de droit international. Autant de passagers que nous sommes dans notre cabine, notre quiétude a été perturbée. On a voyagé dans des conditions indécentes.
S. K., ce réfugié sierra léonais nous a fait pitié. Tous les passagers étaient consternés. Mais impossible, il était menotté au siège de la dernière rangée de l’avion. Il n’a bu ni eau, ni mangé. Rien ne lui a été donné. On se demande si la Gendarmerie ou la police belge respecte les droits les plus élémentaires d’un citoyen, fut-il africain ».
Lettre d’un passager, recueillie par le Collectif de résistance aux expulsions et aux centres fermés. (13/5/99)
Une expulsion ratée, la violence
« Voici les propos de cinq des policiers de l’aéroport : « on va t’attacher comme un saucisson », « tu peux crier autant que tu peux personne ne t’entendra ».
Ils m’ont traînée par terre de l’entrée jusqu’au fond de l’avion. J’avais tellement mal que je n’arrêtais pas de pleurer. Je n’avais jamais ressenti tant de douleur et d’humiliation de ma vie jusqu’à ce jour. Je n’arrivais plus à respirer car les deux policiers chargés de mon rapatriement m’étouffaient à l’aide des coussinets.
Les passagers du vol, écœurés par cette méthode, se sont révoltés. C’est pourquoi finalement, ils ont décider de me descendre de l’avion. Dans le fourgon, le chauffeur me lança cette réflexion d’un ton menaçant : « tu as gagné la bataille et non la guerre. Inscrit le sur ton ventre. La prochaine fois ce sera pire ». Les coups et blessures ont été constatés par le médecin de la prison de Berkendael ».
Témoignage recueilli par la Ligue des Droits de l’Homme. (5/9/98)
Avant l’expulsion, les plaintes
« Dès que je suis arrivée, ils m’ont demandé si je voulais retourner dans mon pays. Alors j’ai dit « je ne peux pas retourner dans mon pays à cause des circonstances. Il y a la guerre dans mon pays. Je suis recherchée. Si je retourne dans mon pays, ils me tueront. J’ai dit « s’il vous plaît, gardez-moi en prison. Après quelques temps quand (…) vous me renverrez dans mon pays… Il y avait deux hommes, un à ma droite et un à ma gauche. Celui à ma droite m’a dit « tu dois partir ou on te fera la même chose, tu dois partir ». Je pleurais. De six à dix heures, j’ai pleuré. Après, l’homme m’a dit qu’il était temps d’aller vers la zone de transit. Je l’ai supplié de ne pas me renvoyer dans mon pays. Là-bas ils me tueront. Je hurlais. Ils m’ont dit « non, tais-toi, tu dois partir …j’ai pleuré encore ».
Témoignage recueilli par le Collectif Contre les Expulsions. (25/1/99)
Témoignage anonyme, l’expulsion, le retour
« 5 policiers se sont acharnés sur elle. Comme elle a refusé de s’asseoir dans l’avion où elle était seule, on lui a donné des coups dans le ventre. C’est une mère de famille qui avait précédemment subi une césarienne. Elle est débarquée grâce à l’exigence d’une dame (du personnel ?)
Partie à 6 heures du matin de la prison, elle y revient à 18 heures courbaturée, aphone car, comme à la Camerounaise, on a voulu étrangler ses cris. Elle avait très mal au ventre et vomissait. Les traces des liens étaient visibles quelques jours plus tard. Le constat a été fait à la prison ».
Témoignage recueilli par la Ligue des Droits de l’Homme. (13/9/98)
La résistance
« Ils m’ont emmené trois fois à l’aéroport. Les deux dernières furent sanglantes. Le 13 janvier 1999, ils m’ont sérieusement lié. Mais lorsqu’ils m’ont emmené dans l’avion, j’ai commencé à crier et le pilote est venu et a dit qu’il ne voulait pas me transporter. Ils m’ont ramené, enfermé dans une cellule de l’aéroport durant environ trois heures avec les menottes et les cordes autour de mes mains et de mes jambes. La troisième fois, c’était le 3 février 1999. Ils m’ont à nouveau lié. Cette fois il y avait environ neuf à dix policiers. Ils ont été parler au pilote qui a accepté de me transporter.
Ils m’ont entré de force dans l’avion (Sabena). J’ai commencé à crier, je cognais même ma tête contre le siège. Les passagers me regardaient mais ne disaient rien. J’ai crié durant une heure avant d’être descendu de l’avion. Cette fois ils ont pris mon unique chaussure, que je n’ai pas revu jusqu’à aujourd’hui ».
Témoignage recueilli par le Collectif de résistance aux expulsions et aux centres fermés. (3/3/99)
ccle - 13 mai 1999
Date | Nom et site Web | Message |