A gauche, à gauche ! A gauche, c’est - géographiquement - l’endroit où se trouve le siège du PS et du SP par rapport à la sortie de la cathédrale Saint-Michel. Et c’est cette direction qu’un bon millier de manifestants, africains essentiellement, ont fait prendre de force au corbillard transportant le corps de Semira Adamu.
La tension était très vive à l’issue de la cérémonie. D’emblée, le corbillard a été bloqué pendant que fusaient des cris réclamant la démission de Tobback et du gouvernement. A la tête du "détournement", la cousine de Semira, venue d’Italie. Les organisateurs de la cérémonie ont finalement laissé la communauté nigériane amener le corps devant le siège du SP où s’est tenu une minute de silence.
Puis quelque 250 manifestants se sont engouffrés dans le train pour le centre fermé de Bruges où avaient été transférés vendredi soir une vingtaine de compagnons de Semira, vivant dans la même aile de bâtiment. Le ministère de l’Intérieur avait "vidé" le 127 bis par peur des manifestations du Collectif contre les expulsions. C’était mal connaître ses militants que d’imaginer que 80 kilomètres allaient les dissuader.
Les autorités craignaient visiblement des heurts. La gendarmerie de Bruges avait en hâte demandé du renfort à Bruxelles. Quand le groupe de manifestants est arrivé devant les portes du centre, vers 17 h 30, l’accès à celui-ci avait été "protégé" par plusieurs véhicules d’assaut de la gendarmerie et par un cordon de chevaux de frise.
Dès l’arrivée des manifestants bruxellois, les réfugiés détenus se sont mis à tambouriner aux fenêtres, comme ils l’avaient déjà fait à midi pour protester contre le refus de la direction de leur permettre d’assister à la cérémonie d’hommage à Semira. A l’extérieur du centre, les manifestants ont donné des fleurs aux gendarmes tandis que des groupes de théâtre de rue mimaient la mort violente d’un réfugié étouffé par un coussin.
Une délégation des manifestants, menée par Daniel Liebmann, a finalement été reçue par le directeur. Les membres du collectif ont pu s’entretenir avec les amis de Semira en grève de la faim depuis plusieurs jours. Pendant la visite, les gendarmes ont été appelés à l’intérieur du centre : un début d’émeute s’y produisait.
Le Collectif contre les expulsions avait l’intention de camper devant le centre de Bruges. Les manifestants ont cependant préféré reprendre le train pour Bruxelles afin d’éviter une confrontation éventuelle avec les hooligans brugeois au retour du match avec le club de Lierse. Trop de ces hooligans en effet seraient proches du Vlaams Blok.
Dimanche, à 14 heures, c’était au tour de Frontières ouvertes de manifester devant le centre fermé de Bruges, toujours aussi hermétiquement fermé par la gendarmerie.
E.S. et M.Vdm.
Le Soir - 28 septembre 1998
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