Situation juridique et perspectives

dimanche 1er avril 2001.
 


Le CCE est actuellement sous le feu de trois dossiers d’inculpations qui résulteront dans des procès dans un avenir plus ou moins proche.

Le premier, dont la date est fixée au 4 mai, ne concerne qu’une personne mais aura pour nous valeur de test que nous ne pouvons rater. Les deux autres concernent les actions que nous avons mené en 1998 et visent au total 19 personnes. Il est presque certain que ces deux derniers dossiers seront liés.
En résumé, 19 personnes se partagent au total 22 inculpations. Certains égoïstes (les chefs diront les malveillants) raflent une bonne part des charges.

1. Le dossier « Pascal Marchand »

Le contexte est la manifestation du 3 octobre 1999 à Steenokkerzeel, contre l’expulsion collective des Roms. Pascal Marchand est accusé de tentative de vol ainsi que de coups et blessures (avec effusion de sang) à l’encontre d’un gendarme en civil qui prenait des photos. Il lui est reproché en outre une destruction de matériel, en l’occurrence la grille du centre 127 bis. L’affaire est passée en procédure accélérée, ramenée à un fait de vandalisme et décontextualisée tant de la manifestation que de l’action du collectif.
Le dossier est rédigé par un seul gendarme, la victime, et la seule preuve exhibée consiste en une note de pressing (la victime avait son veston tâché de boue).
Pascal a été condamné par défaut une première fois à un an de prison ferme. Le jugement fut cassé et est reporté au 4 mai.

2. Les dossiers « CCE »

1. Les faits
Ces dossiers concernent principalement 5 actions menées en 1998 :
a. 29 juin : blocage d’un fourgon cellulaire de l’office des étrangers transportant un mineur somalien à l’aéroport en vue d’une expulsion
b. 21 juillet : évasion de 25 détenus du centre 127 bis suite à un rassemblement de soutien à Semira Adamu
c. 18 août : blocage d’un fourgon de l’office des étrangers transportant une fille du groupe des évadés du 21 juillet à l’aéroport pour expulsion. La technique utilisée était la projection d’œufs remplis de peinture sur le fourgon à l’arrêt.
d. 14 octobre : manifestation au centre 127 bis contre les expulsions et centre fermés
e. 10 décembre : action devant le parlement à l’occasion de l’anniversaire des 50 ans de la déclaration des Droits de l’Homme.
f. A cela s’ajoutent différentes manifestations en zone neutre (23 et 24/9, 10/12) dont une datant du 3/7/97, dans le cadre d’une action de l’ilôt Stevin.

2. Les charges
Toutes ces actions se transforment en 19 charges réparties comme suit :
a. destruction de propriété mobilière (x2 puisque l’un était le chef) ; entrave méchante à la circulation - 12 personnes
b. destruction de clôture (8) ; aide à évasion de détenu (8) ; menace par geste (8) ; tentative d’incendie volontaire (8) ; coups et blessures (8 + 1 détenu)
c. entrave méchante à la circulation (3) ; destruction de bien mobilier (3) et rébellion (1)
d. rébellion avec violence (3) et destruction de clôture (3)
e. rébellion armée (2) ; rébellion avec violence (4) ; coups à agent (1) ; détention illégale d’arme prohibée (1) ; outrage à agent (3)
f. manifestation en zone neutre (8)
Ces deux dossiers doivent encore passer devant la Chambre du Conseil, qui décidera de son renvoi devant les tribunaux. Le Procureur a déjà demandé leur jonction. Nous n’avons pas pour l’instant de date de comparution.

3. Le fond
Le plus marquant à la lecture des plus de 1000 pages que contiennent ces 2 dossiers, c’est l’accumulation des charges retenues et l’image de groupe organisé et violent utilisée pour présenter le collectif ( chaque accusation est agrémentée de la circonstance que l’action a été commise en bande et par suite d’un concert préalable).
L’absence de preuves dans ce dossier ne nous pousse pas à l’optimisme. Il existe, dans les milieux du Pouvoir « 3 en 1 » une volonté manifeste de nous faire payer notre insolence et dans un même élan de légitimer un peu plus la politique d’expulsion et les acteurs qui la portent.

4. La défense
Nous savons que le combat ne se situera pas au niveau des preuves : nous avons fait ces actions, nous les avons revendiquées ouvertement et nous n’éprouvons ni « regrets ni remords ». Aux yeux de certains, cela suffit largement à faire de nous des coupables.
Aux nôtres, ces procès n’ont aucune légitimité : ils visent à sortir nos actions du cadre politique pour les placer dans le cadre judiciaire, les vider de tout sens et effacer les questions que nous posons. En agissant de la sorte, nous pouvons affirmer que le Pouvoir nous fait un procès politique. Nous allons donc leur opposer une défense politique.

Sans nous avancer sur une ligne de défense qui reste à définir, nous pouvons déjà préciser quelques points :
a. nous viserons dans la mesure du possible à mettre sur pied une défense collective de l’ensemble des inculpés. Toutefois, chacun reste libre d’assurer sa propre défense sur d’autres bases et devra compter avec le soutien de tous ;
b. nous n’avons pas à justifier ni de nos actions, ni de nos convictions devant un tribunal. Ce faisant, nous étudions l’hypothèse et les conditions d’un procès de rupture qui verra dès lors s’opposer deux logiques antagoniques. Il doit être, en tous points, un événement exceptionnel ;
c. Nous voulons que ce procès soit une nouvelle occasion de dénoncer et combattre la politique d’expulsion, de détention et d’exploitation des sans papiers, le régime sécuritaire et ses logiques de contrôle qui nous étreignent. Nous appellerons à témoigner toutes les personnes qui peuvent apporter, par leur recherche, leur travail et surtout leur expérience un élément de réflexion.


5. Le comité de soutien

Un procès en rupture n’a de sens qu’à la condition de susciter un écho autour de nous et de chercher à ouvrir des brèches nécessaires à la construction de nouveaux espaces de liberté. Pour y arriver, il nous faudra rencontrer ceux qui dans leur quotidien, vivent la précarité, l’absence de droits, les contrôles au faciès, les visites domiciliaires, les brimades des gardiens, … Il nous faudra construire les ponts et créer les espaces d’expression et d’échange.
Mais nous aurons aussi besoin d’être entourés, protégés et conseillés pour ne pas foncer droit dans un mur. Nous sommes parti pour un combat difficile pour lequel nous demandons un triple soutien moral, politique et matériel.


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