Les parties civiles réclament 100.000 euros de dommages et intérêts.
Et la condamnation effective de tous les prévenus. La défense plaide le 15 octobre.
Tout le monde a droit à être traité humainement. Même quand on est illégal et noir. Même lors d’un rapatriement. C’est avec des phrases simples, courtes et percutantes que Me Hein Diependaele, l’un des avocats de la famille de Sémira Adamu a tenté de convaincre les juges de la 46e chambre du tribunal correctionnel de Bruxelles de la nécessité de condamner à des peines plus sévères qu’une suspension du prononcé les trois ex-gendarmes responsables de la mort par asphyxie de la jeune Nigériane.
Les faits ont été retracés avec minutie par Me Denys. Insistant à plusieurs reprises sur la violence inappropriée et mortelle qu’ont utilisée les gendarmes lors de la tentative de rapatriement forcé, il a réclamé 10.000 euros de
dommages et intérêts pour chacune des parties civiles (les cinq frères et soeurs de la victime et l’oncle qui a élevé Sémira) et 40.000 euros pour la victime elle-même, lesquels reviendront de droit à ses proches.
Dans sa plaidoirie, Me Diependaele a relevé qu’un véritable estompement de la norme régnait à l’époque, tant au niveau des politiciens que de la Sabena ou de la gendarmerie. Et que beaucoup de personnes dans cette histoire ont ouvert leur parapluie, se réfugiant derrière cet estompement pour justifier ce qui s’est passé.
Clou du dossier selon l’avocat : la déclaration faite juste après l’« accident » par Johnny P., l’un des trois ex-gendarmes prévenus. Il parle de la procédure du coussin. Il dit que le coussin ne peut être posé sur le visage d’une personne que quelques secondes. Qu’il fallait relever la tête régulièrement. Que c’est quelque chose qu’on lui a appris. Il le savait donc ! Pourtant le coussin a été appliqué une vingtaine de minutes !
Les raisons de l’application de la technique du coussin ne sont pas non plus établies pour Me Diependaele. Le « moment crucial », celui où Sémira se rebelle et qui a poussé les escorteurs à la maîtriser, n’a pas été filmé, rappelle-t-il.
Certains témoins ont dit qu’elle a commencé à crier, d’autres qu’elle a parlé plus fort, d’autres qu’elle avait l’intention de crier... Où était la résistance ? Pour moi, on n’a pas suivi la directive. La protestation n’est pas prouvée.
Quant aux deux officiers chargés de superviser l’expulsion, ils sont responsables d’une faute non seulement professionnelle mais aussi pénale, estime Me Wallyn. Présents dans l’appareil, ils ont tout pu voir. Un seul mot de leur
part aurait suffi pour ne pas provoquer la mort de Sémira. Ce mot, c’était « Stop ! ». Ils ne sont pas intervenus. Ils n’ont pas agi comme des hommes raisonnablement prudents. Sans leur faute, le décès aurait pu être évité. Pourça, ils doivent aussi être condamnés.
Me Wallyn relève en plus que les deux officiers ont confié cette mission de rapatriement, que l’on savait à risques, à Johnny P., un gendarme qui avait fait l’objet d’une mesure disciplinaire quelques mois auparavant, pour des faits qui se sont également produits lors d’un rapatriement.
Fabienne Defrance - Le Soir, 09/10/2003
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