Les débats du procès Adamu sont clos

vendredi 7 novembre 2003.
 

Le tribunal correctionnel de Bruxelles, qui a clôturé vendredi les débats du procès Semira Adamu, rendra son jugement le 12 décembre. Au cours des dernières répliques, Me René Kumpen, avocat d’une des gendarmes (Johnny P.), a indiqué que, selon lui, le ministère public avait trompé les prévenus.

Le tribunal correctionnel de Bruxelles a clos vendredi les débats dans le procès du décès par asphyxie de la jeune Nigériane Semira Adamu, lors de sa sixième tentative de rapatriement, le 22 septembre 1998. Le jugement sera rendu le 12 décembre. Vendredi, un avocat de la défense a estimé que le ministère public avait trompé les prévenus.

Les gendarmes escorteurs affirment que Semira Adamu s’était violemment rebellée dans l’avion de la Sabena en partance pour le Togo, sur le tarmac de Bruxelles-National. Ils ont aussi indiqué avoir subi des pressions pour que cette tentative de rapatriement, la sixième, réussisse. Au cours de l’opération, ils ont maintenu Semira Adamu sur son siège, lui appliquant un coussin pour l’empêcher de mordre ou d’appeler les passagers à l’aide. Après de longues minutes, la jeune femme était tombée dans un coma dont elle ne s’est pas réveillée.

Selon le médecin légiste, Semira Adamu est morte par asphyxie, en raison de la conjonction de huit facteurs, dont le coussin, la pression physique d’un gendarme ou encore un accoudoir qui écrasait son abdomen. Ce décès a entraîné un mouvement dans l’opinion publique qui a poussé le ministre de l’Intérieur de l’époque, Louis Tobback, à la démission.

Après cinq années de débats complexes en Chambre du conseil, cinq anciens gendarmes, aujourd’hui policiers, ont été cités à comparaître en correctionnelle. Les trois qui ont tenu physiquement la jeune Nigériane y répondent de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Deux supérieurs, chargés d’encadrer l’opération, sont inculpés pour leur part de coups et blessures involontaires et de non-assistance à personne en danger par défaut de prévoyance ou de précaution. L’Etat belge, lui, a été cité par les parties civiles en tant que civilement responsable des cinq gendarmes.

Deux des trois escorteurs (dont un avait déjà subi une sanction disciplinaire) ont reconnu leur culpabilité pour coups et blessures, mais involontaires. Les autres gendarmes - un troisième escorteur intervenu plus tard et les deux supérieurs - ont plaidé non coupables.

Vendredi, les parties civiles ont tenu leurs dernières répliques. Pour Me Hein Diependaele, avocat de la famille Adamu, la différence entre coups et blessures volontaires ou involontaires n’a pas de sens. "La violence policière, par définition, est volontaire. La question est de savoir si cette violence était proportionnée ou nécessaire. La réponse est deux fois ’non’ : il était clairement mentionné dans les directives que le coussin ne pouvait être utilisé que quelques secondes", a-t-il une nouvelle fois souligné.

Me René Kumpen, avocat de l’escorteur (Johnny P.) qui a été le principal acteur de l’immobilisation de la jeune femme, a critiqué l’attitude du ministère public : "Le procureur du Roi requiert une condamnation pour coups et blessures volontaires et ose affirmer qu’elle n’aura pas de conséquences pour nos clients ni pour leur carrière au sein de la police. C’est tout le contraire qui arrivera. Ils feront certainement l’objet d’une poursuite disciplinaire. Ils devront aussi assumer personnellement les dédommagements qui reviennent - à juste titre - aux parties civiles". Une condamnation pour coups et blessures involontaires les déchargeraient en revanche du payement des dédommagements, que l’Etat belge assumerait alors. "Et quelles seront les conséquences au sein de la police fédérale ?

Comment pensez-vous que les policiers réagiront face à leurs supérieurs quand ils recevront l’ordre de faire ce ’sale boulot’ alors qu’ils savent qu’ils courent le risque d’être personnellement responsables ?", s’est interrogé l’avocat. Pour Me Kumpen, une condamnation pour coups et blessures volontaires aurait un impact sur l’attitude des syndicats, avec peut-être des actions de grève pour conséquences.

Le jugement est attendu le 12 décembre.

Belga, 7 novembre 2003


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