Ancienne résistante et rescapée dAuschwitz, Sarah Goldberg se sent concernée par les problèmes vécus par les sans -papiers en Belgique. Son père, chassé de Pologne par l’antisémitisme est arrivé clandestinement en Belgique en 1929. Elle fait partie des personnalités ayant signé l’acte d’hébergement et de soutien aux réfugiés lancé par le Collectif contre les expulsions.
- Comme une centaine d’autres personnes, vous avez signé l’acte d’hébergement suite à l’évasion des réfugiés du centre 127bis, le 21 juillet. Pouvez-vous expliquer votre motivation ?
Je me suis toujours placée du côté des gens qui souffrent. Moi aussi, je suis une immigrée. Quand mon père est arrivé en Belgique, lui non plus n’avait pas tous les documents demandés. II est naturel pour moi d’aider des gens qui se trouvent dans de telles conditions : enfermés et privés de droits humains élémentaires. Comme les juifs de l’époque, ces gens n’ont commis aucun délit et sont enfermés uniquement pour ce qu’ils sont.
Cependant, on enferme des hommes, des femmes et des enfants. Des enfants qui ne peuvent aller à l’école, c’est inacceptable.
On ne peut enfermer quand il n’y a aucun délit.
- Le discours et les actes de la Belgique font tout pour dissuader les réfugiés. Montrer à la population et aux réfugiés potentiels qu’il y a une répression dure et qu’en Belgique on ne rentre pas.
II n’y n pas de raison que la Belgique n’accueille pas. Quand une famille arrive ici avec des enfants, c’est que dans leur pays, la vie leur est devenue invivable. Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’ils quittent leur maison et leur village. De plus, ils risquent parfois leur vie, certains sont morts en essayant d’arriver dans ce pays. C’est donc pour échapper à une réelle détresse.
Par ailleurs, je maintiens que d’autres raisons que purement politiques sont valables pour demander l’asile dans notre pays. Dans le cas d’une famine ou encore en raison de "tortures culturelles " telles que l’excision par exemple ; il est normal que ces femmes s’enfuient.
- II nous est constamment rétorqué que si on ne procède plus aux expulsions, notre pays va être envahi par des hordes d’étrangers...
Primo, tous ne veulent pas venir en Belgique et secundo, il est nécessaire que les pays riches aident les populations en difficulté dans d’autres pays via l’aide nu développement car ils ne partent pas de chez eux de gaieté de cœur.
- Que pensez-vous, globalement, du travail du Collectif contre les expulsions ?
C’est grâce au Collectif et malheureusement suite à la mort de Semira que tout s’est réveillé et que l’on sait maintenant ce qui se passe réellement en matière d’expulsions.
- Pensez-vous que les choses vont changer nu niveau de la politique gouvernementale ?
Oui, les actions du Collectif ont eu un impact un peu dans tous les domaines : au niveau politique, au niveau des pilotes, ... Actuellement, des citoyens se mobilisent qui ne savaient pas ce qui se passait. Des gens ont pris ce problème à coeur et peut-être que cela va changer. J’ai vu notamment que des parlementaires se sont réveillés. Quand on votera, il faudra choisir des gens qui s ’occupent activement de cette question.
- On peut résumer votre position et votre engagement par une solidarité spontanée...
Oui car quand les juifs étaient recherchés, c’est grâce à la solidarité de citoyens belges que beaucoup ont été aidés et sauvés. Je pense qu’il revient au peuple juif, qui a tant souffert, d’être très vigilant aux souffrances d’autrui.
- La réference souvent faite avec le nazisme...
Je suis une ancienne déportée d’Auschwitz et, selon moi, il ne faut pas comparer les camps de concentration nazis avec les centres fermés en Belgique.
II ne faut pas exagérer et tout mélanger. Ce qui se passe en Belgique est inhumain, humiliant et inacceptable. Tout cela je le critique et le rejette mais je ne comparerais pas le centre 127bis à un camp nazi.
Si on exagère, on n’est plus crédible. II faut dire la vérité et ne pas amplifier les événements. Après la guerre, les russes voulaient par exemple exagérer le nombre de morts d’Auschwitz. Cela discrédite et sème la confusion.
- Quelle est votre position concernant la régularisation ?
Je peux très bien comprendre les peurs de ces personnes. A chaque moment, dans la rue ou ailleurs, il y a une tension interne, une crainte, ... Ces gens se sentent traqués.
II est logique et évident de régulariser les personnes qui vivent en Belgique. Ils sont là depuis parfois très longtemps, ils ont fondé une famille, ont un travail... Ce n’est que logique de les régulariser.
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