Chronique de violence annoncée

.... ou quand l’Office des Étrangers provoque une fausse couche
jeudi 10 décembre 1998.
 

B. K. est une réfugiée congolaise âgée de 20 ans. Elle est arrivée en Belgique avec son fils de 5 ans, C., le 18 octobre. Sa demande d’asile ayant été rejetée, elle est détenue au centre de rapatriement 127 bis. Elle était enceinte de plusieurs mois il y a encore quelques jours.

Le 31 octobre, comme d’autres détenus, elle a été victime d’une intervention violente de la gendarmerie dans le centre. Ce jour-là, un nigérian devait être expulsé vers Lagos. Comme il tentait de se défendre, le personnel de l’Office a utilisé la violence (cf. Le Soir du 5/11/99). Les autres détenus se sont alors interposés pour défendre leur compagnon d’infortune. Ils ont été rassemblés dans le réfectoire du centre et chargés par la gendarmerie appelée en renfort. Le matraquage collectif a été très violent. Dans la mêlée, B. K. a reçu des coups, a été jetée par terre et traînée sur le sol tirée par les cheveux, son fils accroché à elle. En réponse aux protestations de son avocat, l’Office des Etrangers lui affirma qu’une enquête serait ouverte et que personne ne serait expulsé avant d’avoir les conclusions. En réalité, plusieurs détenus furent expulsés dès les jours suivant. (dont un qui eu la mâchoire fracturé). B. K. a été emmenée à l’aéroport le 6 Novembre pour être renvoyée vers Kinshasa. Elle a refusé de monter à bord de l’avion..

Suite aux violences subies, B. K. s’est plaint de douleurs au ventre et s’est retrouvée dans l’incapacité de manger. Elle a alerté à plusieurs reprises le médecin du centre 127 bis, qui semble n’avoir jamais pris l’affaire au sérieux. Le 24 novembre, la jeune femme congolaise a été victime d’une fausse couche. II a fallu l’intervention des autres détenus pour obtenir son évacuation vers l’hôpital, où elle a été admise vers 21 heure. Trop tard cependant pour sauver l’enfant qui est décédé en chemin. Cette fausse couche était prévisible. Quelques jours avant l’expulsion, elle avait subit des saignements à plusieurs reprises. A l’hôpital, ce n’est que le jeudi que des soins spécifiques et adéquats lui ont été administrés. Directement après, elle a été ramenée de force au centre 127 bis, où elle a pu retrouver son enfant laissé seul durant ces deux jours d’hospitalisation. Elle y est toujours détenue et ne bénéficie d’aucuns soins particuliers. Elle risque l’expulsion à tout moment !

Le décès de l’enfant était prévisible. B. K. s’est plaint de douleurs au ventre durant plusieurs semaines et a perdu du sang plusieurs jours avant la fausse couche. De plus, son incapacité de manger sous peine de tout remettre n’était-il pas un signe que des soins particuliers lui étaient nécessaires ? Pourquoi a-t-il fallu deux jours pour qu’elle soit traitée correctement ?

Les violences commises contre B. K., la tentative d’expulsion ainsi que les conditions de détention nous paraissent clairement être la cause de la perte de son enfant. Nous pourrions ajouter le manque de soins médicaux. Blandine a déposé plainte pour coups et blessures, non assistance à personne en danger, et abus d’autorité. La responsabilité de l’Office des Étrangers et de la gendarmerie, donc du ministre de l’intérieur, est claire. Néanmoins, malgré la gravité des faits, l’Office des Etrangers souhaite étouffer l’affaire et échapper une fois de plus à ses responsabilités.

Depuis le meurtre de Semira Adamu, malgré des promesses d’humanisation de la loi, la situation s’est encore durcie pour les réfugiés. La seule mesure concrète qui a été prise est le renforcement de la gendarmerie. Admirons les conséquences. Obnubilées par leur volonté d’expulser massivement, les autorités belges adoptent quotidiennement un comportement froid, violent et finalement meurtrier. Ceux qui mènent cette politique ont du sang sur les mains mais ne semblent guère s’en soucier. Sans doute vont-ils faire passer cela pour un banal accident, imprévisible mais qu’il ne faut pas généraliser. Cette hypocrisie, que nous entendons depuis le 22 septembre, a assez duré. D’autres violences ont été commises dans les centres depuis lors et la violence va reprendre lors des expulsions. II s’agit de la chronique d’une mort annoncée, qui se répétera tant que la Belgique pratiquera cette politique d’expulsions massives.

Pendant des semaines, Blandine s’est plainte de douleurs intenses. Le médecin du centre se borne à constater les couleurs et les saignements et lui prescrit des anti-douleurs.

Sans la pression des autres détenus, B. K. ne serait jamais aller à hôpital. Quand elle y est enfin amenée, il est trop tard.

Le médecin de garde à l’hôpital de Vilvorde, le docteur M’Baka, contacté par l’avocat, est, dans un premier temps, d’accord de rédiger un certificat attestant que la fausse couche est due à un choc traumatique. Puis quand l’avocat essaye de le recontacter, il reste injoignable pendant des semaines et refuse finalement de faire ce certificat.

Vous avez dit pression ????

Deux semaines plus tard, le ministre de l’Intérieur (suite à une interpellation parlementaire) répond que la fausse couche n’a rien à voir avec des violences commises, vu que ces violences n’ont jamais été commises.

Et de toute façon, quoi qu’il soit arrivé, la demande d’asile est fausse... donc peu importe les faits...
Un député CVP alla jusqu’à porter la responsabilité sur Blandine qui se serait auto-mutilée pour pouvoir rester en Belgique.

Plainte a été déposée au parquet et à l’ordre des médecins, ce qui ne change rien à la procédure d’expulsion. Blandine risque l’expulsion à tout moment...

CCLE

Le texte intégral de la plainte


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